En refusant de reconnaître le caractère sériel des sinistres Girardin dans le cadre des produits commercialisés par la société Hedios Patrimoine, la cour de cassation ouvre la voie à une meilleure prise en charge des clients des CGP par leur assurance RC Pro.
L’affaire avait à l’époque quelque peu agité le monde de la gestion de patrimoine. A la fin des années 2000, la société Hedios Patrimoine avait commercialisé des opérations dites de « Girardin industriel » dans le secteur photovoltaïque, conçues par la société Dom Tom Défiscalisation (société DTD), suivies d’un produit de défiscalisation dénommé « Girardin Solaire Hedios ». Le produit Dom Tom Défiscalisation s’est avéré être une pure escroquerie.
Le manquement à l’obligation d’information et de conseil…
Pendant que les acteurs de DTD étaient condamnés au pénal en 2018, les investisseurs, dont de très nombreux clients de la société Hedios, subissaient des redressements fiscaux importants.
En janvier 2018, l’assureur de responsabilité civile professionnelle (RC Pro), MMA, a été condamnée par la Cour d’appel de Paris à garantir la société Hedios patrimoine des condamnations prononcées à son encontre au titre des investissements réalisés par l’un de ses clients, considérant qu’il s’agit d’un défaut de conseil unique et non d’un sinistre sériel, pour lequel l’assureur estimait qu’il devait appliquer un plafond global de garantie de 4 millions d’euros pour l’ensemble des clients de la société Hedios patrimoine.
Dans son arrêt de principe du 24 septembre 2020, la Cour de cassation a donné raison à la Cour d’appel en retenant que « les dispositions de l’article L. 124-1 du code des assurances consacrant la globalisation des sinistres ne sont pas applicables à la responsabilité encourue par un professionnel en cas de manquements à ses obligations d’information et de conseil, celles-ci, individualisées par nature, excluant l’existence d’une cause technique, au sens de ce texte, permettant de les assimiler à un fait dommageable unique ».
…est individualisé par nature.
« La Haute juridiction a statué non seulement sur la responsabilité civile professionnelle d’Hedios Patrimoine mais également sur le caractère non sériel du sinistre causé par un conseiller en investissement financier qui fournit de manière répétée le même conseil à chacun de ses clients, pour finalement vendre à tous le même produit.
En pratique, cela signifie que le plafond de 4 millions d’euros des contrats de RC Pro doit s’appliquer pour chaque investisseur et non de manière globalisée pour l’ensemble des clients du CGP, et l’assureur ne peut pas prévoir un séquestre pour retarder le paiement des condamnations prononcées.
Cet arrêt à un impact énorme pour les investisseurs lorsque l’on sait qu’Hedios Patrimoine avait commercialisé pour plus de 13 millions d’euros de ce type de produits de défiscalisation, dépassant donc largement le plafond de garantie des MMA de manière globale. C’est aussi la première fois que la Cour de cassation se prononce sur le caractère sériel d’un sinistre dans le domaine du devoir d’information et de conseil pesant sur un professionnel », commente Hélène Feron-Poloni, avocate associée du cabinet Lecoq-Vallon & Feron-Poloni.